Hébergement insalubre de 35 vendangeurs à Nesle le Repons. Crédit photo l’Union.

Champagne : en cas d’hébergement insalubre, logeurs et employeurs de vendangeurs (donneurs-d’ordres et prestataires de services) mis en cause encourent de lourdes sanctions.

Pas moins de quatre hébergements insalubres fermés par arrêté préfectoral ont nécessité le relogement d’au moins 160 saisonniers, pendant la vendange 2023. Des chiffres record et du jamais vu en Champagne. Pourtant, des contrôles d’envergure sont organisés par les services de l’État sous l’égide de l’Unité régionale de lutte contre le travail illégal de la Dreets (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), depuis 2018. 

« Les hébergements collectifs des vendangeurs font l’objet systématique de contrôles »atteste la préfecture de la Marne.  «Les années précédentes, les injonctions de relogement effectuées par les inspecteurs du travail avaient suffi à faire cesser les infractions. » Et de préciser qu’en 2022, près d’une centaine de vendangeurs avaient été relogés.

l’ouverture de deux enquêtes pour traite d’êtres humains confirmées par le parquet de Châlons-en-Champagne

L’obtention d’une dérogation en vue de l’assouplissement certaines normes d’hébergement de saisonniers pendant les vendanges 2023, autorisant une augmentation du nombre maximal de saisonniers par chambré pour une surface minimale allouée par travailleur abaissée, n’aura malheureusement pas suffi à régler les problèmes liés à l’hébergement, bien au contraire.

C’est ce que confirme la préfecture : « cette année, pour certaines situations, des fermetures préfectorales ont été nécessaires ». Tout en précisant « Outre la demande de fermeture administrative, les inspecteurs du travail ont également la possibilité de verbaliser chaque non-conformité constatée dans les hébergements ». Ces amendes peuvent leur coûter très cher, jusqu’à plusieurs milliers d’euros par saisonnier hébergé, et dans les cas les plus graves, « les inspecteurs peuvent transmettre un procès-verbal relevant le délit d’hébergement incompatible avec la dignité humaine au procureur de la République qui décidera d’engager ou non des poursuites »

C’est le cas cette année pour la fermeture d’un immeuble à Mourmelon-le-Petit le 8 septembre, mais aussi après la découverte de 52 vendangeurs exploités à Nesle-le-Repons le 15 septembre. Pour ces affaires, le parquet de Châlons-en-Champagne a ouvert deux enquêtes pour « traite d’êtres humains », et les plaintes des travailleurs concernés ont été enregistrées par les forces de l’ordre.

Qui est qui et qui fait quoi ? Décryptage :

L’employeur, c’est-à-dire la maison de champagne ou le viticulteur donneurs-d’ordre et le prestataire de services, ainsi que le logeur, c’est-à-dire celui qui possède les locaux dans lesquels sont hébergés les vendangeurs, peuvent être poursuivis pour « traite d’êtres humains ». Ils encourent une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. Il ne faut pas également oublier tous ceux qui logent les saisonniers sous des tentes, violant impunément l’article 5 de l’arrêté ministériel du 01 juillet 1996 relatif à l’hébergement des travailleurs agricoles.

Pour rappel, dans une affaire similaire de « traite d’êtres humains » à Oiry remontant aux vendanges 2018, un couple de cogérants d’une société de prestations viticoles a été condamné en appel, en 2022, à trois ans de prison dont un an ferme.

Mais, tout comme l’assouplissement des règles d’hébergement obtenues par les instances champenoises (UMC et SGV), l’affaire de traite d’humains faisant l’objet de condamnations en 2022, n’a visiblement pas servi d’exemple.

Ce contexte, où la cupidité fait loi, est malheureusement le terreau fertile où germent toutes ces sordides affaires qui entachent l’image de la Champagne depuis plusieurs années …