La production des vins effervescents augmente dans toutes les régions françaises et à travers le monde.

Dans ce contexte, quelle doit être l’attitude de la Champagne ?

Paroles d’expert : Michel Valade, biochimiste spécialisé en œnologie… 

Note de l’intersyndicat CGT du champagne : 

Face à l’augmentation de la concurrence mondiale des vins effervescent nous partageons l’analyse de Michel Valade (lire l’article ci-dessous) sur la seule stratégie possible consistant en une recherche de valeur permettant au champagne de demeurer la référence des vins à bulles et de maintenir sa notoriété mondiale, en mettant en avant ce qui fait sa différence, sa singularité par rapport aux autres vins effervescents.

Cependant, nous pensons que son analyse élude la recherche de réduction des coûts liés aux méthodes culturales de la vigne, notamment depuis le virage pris par l’interprofession concernant l’introduction des vignes semi-larges et d’un nouveau cépage, à la hussarde, dans le cahier des charges de l’AOC Champagne, le 29 juillet 2021.

L’intersyndicat CGT du champagne alerte sur cette réduction des coûts qu’ils soient industriels ou d’exploitations viticoles, car il amorce la proseccoïsation du champagne, alors que des vins effervescents comme la prosecco vont vers une champagnisation des méthodes d’élaboration de leur vin.

Pour l’Intersyndicat toute standardisation, toute banalisation du process est destructrice en terme de valeur et d’image. Et à ce titre, il considère que la conduite traditionnelle du vignoble champenois en rangs serrés, l’interdiction de la taille « guyot » dans les grands crus, tout comme la vendange manuelle, par exemple, font partie intégrante des différences et des singularités, qui doivent être mises en avant dans les phases du process d’élaboration partant du pied de vigne jusqu’à l’expédition des bouteilles.

Dans ce contexte de concurrence accrue, c’est bien la seule stratégie qui permettra à notre produit d’exception de se différencier des autres vins effervescents et de maintenir le champagne, vins des rois et rois des vins, tout en haut de la pyramide des vins effervescents à l’échelle mondiale.

MICHEL VALADE

BIOCHIMISTE  SPÉCIALISÉ EN ŒNOLOGIE

Signe du réchauffement climatique, des centaines d’hectares se plantent au nord de la Champagne, en Angleterre et en Belgique. La production des vins effervescents augmente dans toutes les régions françaises et à travers le monde. L’Italie notamment, produit et commercialise environ 700 millions de bouteilles de prosecco. La Champagne, en comparaison, oscille autour des 300 millions.

Faut-il s’inquiéter de cette situation ? Effectivement, on peut y voir l’augmentation de la concurrence pour le champagne. On peut aussi l’analyser comme un engouement qui ne se dément pas pour les vins effervescents.

Dans ce contexte, quelle doit être l’attitude de la Champagne ?

Son objectif ne peut être de courir après les volumes, elle sera toujours minoritaire sur le marché des effervescents.

 

La seule stratégie possible est la recherche de valeur, mais à condition qu’elle demeure la référence et qu’elle conserve la notoriété dont elle jouit au sein de la famille des vins à bulles.

Comment y parvenir ? En mettant en avant ce qui fait sa différence, sa singularité par rapport aux autres vins effervescents.

En premier lieu, son terroir et les raisins particuliers qui en sont issus. Les Champenois ont fait de leurs caractéristiques un atout qui s’exprime en termes de finesse et de fraîcheur dans les vins.

En second lieu, le savoir-faire acquis sur plusieurs décennies à chaque étape du processus d’élaboration. Il débute avec le pressurage, se poursuit avec l’art de l’assemblage – qui consiste à marier les vins de l’année avec des vins de réserve de plusieurs années antérieures –, le long vieillissement sur lies en cave, la touche finale du dosage, etc.

La Champagne détient ainsi avec ses vins de réserve, ses stocks, ses œnothèques (avec parfois des vins de plus d’un siècle), un patrimoine inimitable pour ses éventuels concurrents. Elle doit savoir les préserver et les valoriser.