Depuis plusieurs décennies, la Sécurité sociale française, pilier de la protection sociale, subit une série de réformes d’inspiration libérale. Ces changements sont scélératement souvent justifiés par la nécessité de résorber un déficit financier jugé alarmant.
En 2025, ce déficit est estimé à 28,4 milliards d’euros, largement imputable à des exonérations massives de cotisations sociales et à des décisions budgétaires favorisant principalement les entreprises. En réalité, ces choix politiques fragilisent un système de solidarité essentiel tout en affaiblissant les services publics, notamment les hôpitaux, au détriment des populations les plus vulnérables.
Exonérations de cotisations : un avantage pour les entreprises
Le discours officiel impute souvent le déficit de la Sécurité sociale à une mauvaise gestion des dépenses. Cependant, les chiffres révèlent une réalité différente : le déficit est principalement dû à des politiques fiscales généreuses envers les entreprises. En 2023, 80 milliards d’euros ont été exonérés de cotisations sociales pour alléger les charges patronales et renforcer la compétitivité. Ces exonérations massives, qui s’appliquent aux salaires jusqu’à 3,5 fois le montant du SMIC, favorisent des emplois précaires tout en asséchant les ressources de la Sécurité sociale.
D’autres mesures, comme la désocialisation et la défiscalisation des rémunérations aléatoires (intéressement, prime PPV, etc.), aggravent la situation en réduisant davantage les cotisations perçues. Face à cela, la tentative de Michel Barnier d’augmenter légèrement les cotisations patronales en 2025 et 2026 devrait rapporter seulement 4 milliards d’euros, une somme largement insuffisante pour combler le manque à gagner créé par ces exonérations.
Des mesures d’austérité qui pénalisent les plus fragiles
Face à ce déficit croissant, le gouvernement a opté pour des coupes budgétaires drastiques dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. Parmi les mesures envisagées : le report de la revalorisation des petites retraites et une réduction des remboursements de soins. Ces décisions, visant à économiser 4 milliards d’euros, touchent de plein fouet les retraités et les malades, déjà affectés par la crise du système de santé.
L’augmentation des dépenses de l’Assurance maladie prévue pour 2025 (+2,8 %) ne suffira pas à répondre aux besoins croissants du secteur. Ce sous-financement continu engendre des inégalités croissantes dans l’accès aux soins, notamment dans les zones mal desservies par les professionnels de santé.
L’hôpital public sous tension : un personnel épuisé
La crise des hôpitaux publics illustre de manière criante cette situation. En 2025, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) accuse un déficit de 400 millions d’euros, ce qui entraîne des décisions drastiques : suspension du paiement des heures supplémentaires, impossibilité de remplacer les arrêts maladie ou de grossesse, et réduction du recours à l’intérim. Ces mesures poussent à bout un personnel hospitalier déjà épuisé, entraînant des démissions en chaîne. Le cercle vicieux se referme, car le manque de personnel aggrave les conditions de travail, mettant en péril la qualité de la prise en charge des patients.
Le projet de budget 2025 : une austérité renforcée
Le budget 2025 annoncé par le gouvernement de Michel Barnier poursuit la logique des précédentes réformes libérales, avec des coupes budgétaires massives. Le gouvernement prévoit 41 milliards d’économies, dont 14,8 milliards pour la Sécurité sociale. L’objectif est de ramener le déficit public sous la barre des 5 % du PIB, au prix de nouvelles réductions dans les services publics.
Les retraités seront particulièrement affectés, avec le gel de l’indexation des pensions sur l’inflation pour les six premiers mois de 2025, entraînant une perte de pouvoir d’achat importante. À titre d’exemple, un retraité percevant 1 531 € nets par mois verrait une perte de 38 € par mois, soit 228 € sur six mois, voir le tableau ci-dessous :
Dans le même temps, les plafonds des indemnités journalières en cas d’arrêt maladie seront abaissés.
Une réforme solidaire est-elle possible ?
La désolidarisation progressive de la Sécurité sociale et des services publics n’est pas une fatalité. La CGT propose une réforme solidaire basée sur une répartition plus équitable des contributions. Elle préconise une refonte des exonérations patronales sur les bas salaires qui pourrait générer des recettes substantielles pour rétablir l’équilibre financier, tout en préservant les droits des assurés. En outre, un renforcement des politiques de prévention en santé publique et au travail permettrait de réduire les coûts à long terme.
Un projet dénoncé par la CGT
La CGT s’insurge contre le projet de budget de 2025 et dénonce les mesures d’austérité annoncées. Dans un communiqué publié en octobre, le syndicat affirme : « Dans la continuité du macronisme, ce sont les salariés et les retraités à qui l’on demande à nouveau de payer l’addition du déficit creusé depuis 7 ans au seul bénéfice des grandes entreprises, de leurs actionnaires et dirigeants. »
Pour la CGT, il est impératif de revenir aux fondamentaux de la Sécurité sociale, en rétablissant des cotisations justes et équitables, afin de garantir un système de protection sociale universel et solidaire. Elle appelle à la suppression des exonérations de cotisations, qui se sont accrues de 20 milliards d’euros sous la présidence d’Emmanuel Macron, pour restaurer les finances de la Sécurité sociale sans pénaliser les plus vulnérables.
Conclusion
Le déficit de la Sécurité sociale, utilisé comme prétexte pour justifier des réformes libérales, est principalement le résultat de choix politiques qui favorisent les exonérations patronales au détriment de la solidarité sociale. C’est pourquoi Il est impératif de mettre un terme au déshabillage de la Sécurité sociale et de rétablir les fondamentaux. La CGT demande une sécurité sociale qui réponde intégralement aux besoins et dont les recettes sont assurées par des cotisations.
Une réforme solidaire, basée sur une contribution plus équitable des entreprises et des ménages aisés, est possible et nécessaire pour garantir la pérennité de notre modèle de protection sociale. Pour le gouvernement Barnier, il est temps de prendre des décisions courageuses. Plutôt que de pénaliser les retraités ou d’empêcher les Français de se soigner et éviter un déficit artificiellement construit, il est urgent de réformer la Sécurité sociale sans sacrifier les droits des assurés ni affaiblir les services publics. Pour cela, il est impératif de revoir les 80 milliards d’exonérations de cotisations, augmentés de 20 milliards depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron.