Pays d’Epernay : les dates de vendanges sont tombées mercredi et elles ont déjà commencé pour certains vignerons du secteur. Constat général : ce sera une année très disparate entre des parcelles très touchées par les maladies et des maturités très variables entre raisins noirs et blancs.
Le top départ pour les vendanges 2021 a été donné mercredi par le Comité champagne. Dans les galipes autour d’Épernay, la majorité des communes pourront commencer le lundi 13 septembre. Mais dans les faits, les vignerons partiront en ordre dispersé. Certains commencent dès aujourd’hui car leurs raisins, notamment les meuniers, doivent être récoltés au plus vite.
D’autres, surtout dans la Côte des blancs, vont devoir ronger leur frein, et ne pourront commencer que le week-end prochain. Une situation qui pousse les exploitants à une certaine gymnastique pour gérer leurs troupes.
L’avis est unanime, l’année 2021 est hétéroclite. « Même à l’intérieur d’une même exploitation, c’est très disparate », constate Charles Philipponnat, à Aÿ-Champagne. « On va commencer mardi prochain en demi-équipe car on a des parcelles avec du botrytis (pourriture grise) qu’il faut ramasser urgemment. On démarrera normalement jeudi. ».
Non loin, chez Deutz, on confirme cette tendance : « C’est une année atypique et pleine d’enseignements. Si la date des vendanges est normale, il y a des écarts énormes de pluviométrie entre les communes, 100 mm entre Châtillon-sur-Marne et Aÿ. » Ce qui a provoqué de fortes disparités. « Sur la Côte des blancs, pour l’instant, c’est très bien. Pour les meuniers, ils ont été fort touchés par le mildiou. » Réduisant la charge des ceps et accélérant donc leur maturation. Résultat, il faut récolter rapidement avant que les grains ne s’abîment.
Ce qui oblige les vignerons à réagir vite, comme Nathalie Sélèque, du champagne Jean Sélèque à Pierry : « On a demandé une dérogation pour démarrer dès cet après-midi (jeudi) car nos meuniers ne peuvent plus attendre. » D’autant qu’entre les épisodes de grêles et le gel, certaines de ses parcelles ont souffert. « J’en ai une à Cormoyeux où on va faire 500 kg à l’hectare [pour un rendement fixé à 10 000 kg cette année, NDLR] donc je vais compenser avec les autres parcelles », complète la vigneronne.
Malgré leurs efforts, il y en a qui n’ont pas réussi
à protéger leurs vignes des maladies
Daniel Etienne, vigneron
Comme une impression de roulette russe. « C’est vraiment une année bizarre, c’est le mot », soupire Maxime Harlin, à Mareuil-le-Port, qui a beaucoup souffert. « J’ai pris moitié moins d’effectif que l’an passé. » « Malgré leurs efforts, il y en a qui n’ont pas réussi à protéger leurs vignes des maladies », glisse Daniel Etienne qui commencera à couper ce samedi à Cumières.
D’autres vignerons ont échappé au gros des aléas comme au champagne Delamotte, au Mesnil-sur-Oger en plein milieu de la Côte des blancs : « On ne va pas commencer avant le 18, mais on est plutôt épargné », sourit Didier Depond qui « a beaucoup d’espoir, surtout s’il fait beau car s’il pleut, la pourriture grise arrivera vite. Mais bon, ça va être une année compliquée comme chaque année. Il faut rester calme et boire du champagne », rigole-t-il.
Pour Patrick Boivin, de Deutz, il faudra de toute façon s’habituer à ces conditions. « Avec le réchauffement climatique, ça va induire de plus en plus d’écarts de pluviométrie et de température. On ne reviendra pas en arrière avec des récoltes qui frôlaient des plafonds énormes. Il va falloir surveiller de plus en plus près les vignes. » Le vignoble ne frémit pas encore d’activité mais tous surveillent leurs raisins comme le lait sur le feu.