À l’appel de la CGT, environ 350 salariés Moët&Chandon-Ruinart ont manifesté leur opposition aux pertes de rémunération et au manque de considération de leur direction © CGT Champagne

✍️ Par l’Intersyndicat CGT du champagne

📅 Publié le 09 avril 2025

⏱️Temps de lecture 5 minutes

Ce mardi 8 avril 2025, une mobilisation d’ampleur a secoué la cour d’honneur de Moët & Chandon-Ruinart. 350 salariés ont répondu à l’appel du syndicat CGT pour faire entendre leur ras-le-bol face aux pertes de salaire et de rémunération, et au mépris de la direction. Bilan des interventions, analyse des enjeux, mobilisation dans les secteurs de l’entreprise : Production service administratifs et le vignoble. Retrouvez dans cet article un retour complet sur cette journée de lutte.

La vidéo de la mobilisation est disponible en bas de l’article.

(Les paroles et la musique de la chanson « Dans la cour d’honneur on s’est levés » ont été réalisées par IA)

Grève du 8 avril à Moët & Chandon-Ruinart : les salariés mobilisés pour faire entendre leurs droits

Ce mardi 8 avril 2025, environ 350 salariés de Moët & Chandon-Ruinart se sont rassemblés dans la cour d’honneur de la maison à l’appel du syndicat CGT pour dénoncer les atteintes répétées à leur pouvoir d’achat, l’injustice salariale, et l’absence de véritable dialogue avec la direction. Plusieurs interventions syndicales ont rythmé cette mobilisation de grande ampleur.

Intervention d’Alexandre Rigaud – CGT Moët & Chandon-Ruinart

Dans son intervention, Alexandre Rigaud commence par remercier chaleureusement les salariés présents et plus particulièrement ceux de Ruinart pour leur mobilisation, ainsi que les élus des autres maisons de champagne venus en soutien à l’appel de l’Intersyndicat CGT.

Il informe les grévistes que la question des primes d’intéressement et de participation est au cœur des tensions : la participation a chuté de 40 %, l’intéressement de 7 %, et certains salariés subissent une perte totale de rémunération allant jusqu’à 8000 €. Il met en évidence l’incohérence des justifications économiques avancées par la direction, en soulignant que les salariés n’ont pas fourni 40 % d’efforts en moins, contrairement à ce que laisseraient entendre les chiffres de la participation.

Alexandre Rigaud dénonce ensuite les écarts de traitement insupportables entre les hauts cadres et les autres catégories de personnel. Il rappelle que certains cadres supérieurs ont perçu des bonus de 13 000 € à 17 000 € ces dernières années, tandis que les plus bas salaires touchent à peine la moitié. Pour lui, les efforts demandés doivent être partagés, et il n’est pas question que seuls les salariés en soient les victimes.

Il évoque également l’attitude opaque de la direction face à la situation économique : aucune communication claire, aucun plan stratégique partagé avec les salariés. Il regrette que seule la CGT prenne la peine d’informer le personnel.

Enfin, il critique fermement les propositions salariales de la direction dans le cadre des NAO : une augmentation générale de 1,6 %, accompagnée de quelques mesures accessoires, qui ne compensent en rien les pertes subies. Il juge ces propositions largement insuffisantes et annonce que la CGT ne signera pas d’accord dans ces conditions, dénonçant le chantage exercé par la direction qui menace de supprimer l’attribution de caisses de champagne si aucun accord n’est trouvé.

Intervention d’Eddy Mars – CGT Moët & Chandon-Ruinart

Dans son intervention, Eddy Mars fait un point sur les discussions menées dans le cadre des NAO hors rémunérations. Il évoque notamment le renouvellement de l’accord senior pour un an, des avancées sur les congés pour événements familiaux (avec la suppression de la condition d’ancienneté), et des échanges en cours sur les heures d’intempéries concernant les saisonniers.

Il insiste cependant sur le blocage persistant de la direction, qui refuse de répondre favorablement à de nombreuses demandes, notamment celles liées à la prise en charge des trajets domicile-travail. Eddy souligne que ces maigres avancées ont été arrachées au forceps, sous la pression des salariés, et que sans mobilisation, la direction ne bougerait pas d’un pouce.

Intervention de Philippe Cothenet – Intersyndicat CGT du Champagne et CGT Moët & Chandon-Ruinart

Philippe Cothenet, pour l’Intersyndicat CGT du Champagne, revient d’abord sur le contexte plus large des négociations dans la branche Champagne. Il critique la méthode de l’UMC, réduisant les NAO paritaires à des formalités : une réunion pour écouter, une autre pour imposer une hausse salariale inférieure à l’indice Insee. Cette stratégie a entraîné un décrochage de 8 % du pouvoir d’achat depuis 2012, notamment pour les ouvriers et agents de maîtrise.

Il rappelle que cette politique a trop longtemps été accompagnée par la signature d’accords de minoration salariale par certaines organisations syndicales dites « d’accompagnement » sous prétexte de protéger les salariés des petites maisons, sans effet réel pour ces dernières. Face à cette spirale négative, l’Intersyndicat CGT-CFDT-FO s’est formé pour refuser le jeu biaisé des minorations de salaires quitte a subir les recommandations patronales, comme celle d’aujourd’hui bloquées à 1,1 %.

Philippe Cothenet explique que, face à cette impasse, les négociations sont désormais relancées dans chaque maison, comme c’est le cas ici chez Moët, puis demain chez Canard Duchêne, et plus tard chez Mumm comme dans d’autres nombreuses entreprises.

Dans un second temps, il s’attarde sur la situation spécifique du vignoble Moët & Chandon, où les embauches de tâcherons sont gelées malgré un volume de travail inchangé. Il dénonce une logique absurde : les hectares à cultiver ne diminuent pas, mais la direction refuse d’embaucher, misant sur des saisonniers à peine encadrés. Il pointe une organisation dégradée, accentuant la pénibilité et nuisant à la qualité du travail.

Il poursuit avec le dossier des classifications : les fiches de poste sont prêtes, et la négociation des coefficients débute. Il met en garde contre une stratégie où l’on octroierait quelques points de classement en échange d’années sans augmentation. Pour la CGT, la revalorisation des classifications doit aller de pair avec une progression salariale concrète.

Il conclut son intervention par un remerciement appuyé à l’ensemble du personnel présent à cette réunion d’information syndicale ainsi qu’à ceux qui continuerons le mouvement cet après-midi. Il souligne que sans les salariés, les revendications syndicales n’ont pas de poids. C’est leur mobilisation qui donne de la force aux combats menés, et c’est uni que les luttes peuvent être remportées.

Cette grève du 8 avril a envoyé un message clair à la direction de Moët & Chandon-Ruinart. Dans un contexte de tension palpable sur tous les fronts, un signal de force s’est manifesté, notamment par l’appel à une grève de deux heures, dès cet après-midi, orchestrée en fonction des horaires de fin de poste et du roulement des équipes. Ce dispositif a également été appliqué dans le vignoble, montrant que tous les secteurs – production, bureaux, cuverie et vignoble – sont prêts à s’unir pour obtenir des avancées significatives.

De surcroît, l’emblématique statue de Dom Pérignon, trônant dans la cour d’honneur, a de nouveau été coiffée d’une casquette et arborait fièrement un drapeau CGT, symbole fort de la détermination des salariés et de l’unité de la lutte syndicale.

La prochaine réunion NAO est prévue dès ce matin, et le syndicat CGT appelle les salariés à maintenir la pression, la solidarité et l’unité. Les discours des syndicalistes CGT sont clairs : seule une mobilisation déterminée permettra d’inverser la tendance et d’obtenir la reconnaissance et l’amélioration des conditions de travail attendues.

Vidéo de la mobilisation (musique et paroles réalisées par IA)