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✍️ Par l’Intersyndicat CGT du champagne
📅 Publié le 23 avril 2025
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« Les entreprises françaises paient trop d’impôts ! » Vraiment ? Cette rengaine mille fois répétée masque une réalité bien plus dérangeante : la France est championne d’Europe des baisses d’impôts pour les entreprises. Pendant que le gouvernement détricote les services publics pour raisons budgétaires, ce sont plus de 260 milliards d’euros qui ont été versés sans contrepartie aux entreprises. Enquête sur une intox fiscale qui a bon dos.
Les entreprises françaises, vraiment les plus taxées d’Europe ? Faux.
L’argument revient en boucle dans les discours patronaux et gouvernementaux : la fiscalité pèserait trop lourd sur les entreprises françaises, entravant leur compétitivité et les poussant à la délocalisation. Pourtant, les données, une fois contextualisées, révèlent un tableau bien différent.
Oui, le taux global de prélèvements obligatoires est élevé en France (46,1 % du PIB selon l’OCDE), mais deux tiers de ces prélèvements sont payés par les ménages, pas par les entreprises¹. Et ce taux inclut les contributions servant à financer les infrastructures publiques, l’éducation, la santé… autant de services dont les entreprises bénéficient directement.
Des baisses d’impôts records : la France en tête en Europe
Si l’on veut comparer ce que les entreprises paient vraiment, il faut soustraire les aides publiques des impôts qu’elles versent. C’est ce que montrent les travaux d’Anne-Laure Delatte et d’Aïmane Abdelsalam : la France est le pays d’Europe où les impôts nets des aides ont le plus baissé en trente ans²;³;⁴;⁵.
En 1996, les entreprises françaises payaient 4 points de PIB de plus que la moyenne européenne. En 2023, cet écart est tombé à 1,4 point, et la tendance est à la baisse continue. Depuis 2017, 40 milliards d’euros par an de mesures favorables leur ont été accordées : baisse de l’impôt sur les sociétés, exonérations massives de cotisations, suppression de la CVAE…⁴;⁵;⁶
Un modèle inefficace et injuste
Malgré ces “cadeaux fiscaux”, les promesses de réindustrialisation et de relance économique ne sont pas tenues : la production manufacturière ralentit, le déficit commercial se creuse, la précarité s’envole⁴;⁵. Les baisses d’impôts profitent en priorité aux grandes entreprises et aux actionnaires, pas à l’emploi ou à l’investissement.
Pire encore : ce sont aujourd’hui les services publics et la protection sociale qui trinquent, au nom de la dette publique… creusée précisément par ces baisses de recettes fiscales⁶.
Un système sous perfusion d’argent public
En 2023, le soutien public total aux entreprises atteignait 260,4 milliards d’euros (Cour des comptes) ⁷. Un modèle où les impôts baissent et les subventions augmentent, sans condition, sans contrôle, et avec des effets sociaux dévastateurs.
Pendant ce temps, plus de 300 plans sociaux ont été recensés depuis 2023, menaçant près de 300 000 emplois⁸. Dans de nombreux cas, les entreprises concernées ont perçu d’importantes aides publiques avant d’annoncer leur fermeture.
Conclusion : il est temps de renverser la table
Loin de subir une “surtaxation”, les entreprises françaises sont en réalité parmi les plus aidées d’Europe. Ce constat devrait provoquer un électrochoc démocratique. Il est urgent de conditionner les aides publiques à des objectifs sociaux et environnementaux clairs, de contrôler leur usage, et de redonner priorité aux services publics et à la justice sociale.
La fiscalité ne doit plus être un outil au service des profits, mais au service du bien commun.
📚 Sources
- Mémo Éco n°146 – Entreprises françaises : des baisses d’impôts records, CGT, avril 2025.
- Alternatives Économiques – Surtaxées les entreprises françaises, vraiment ?, Anne-Laure Delatte, juin 2023.
- CGT – Baisses d’impôts records pour les entreprises françaises, avril 2025.
- Bernard Arnault a-t-il raison de se plaindre de la taxation des grandes entreprises ?, Alternatives Économiques, février 2025.
- Mémo Éco – Aides publiques aux entreprises : le capitalisme français toujours autant sous perfusion.
- La dette, un prétexte pour prôner la baisse des dépenses publiques, Atterrés, août 2024.
- Cour des comptes, estimation du soutien public aux entreprises, juillet 2023.
- CGT – 300 PSE : près de 300 000 emplois menacés ou supprimés, décembre 2024.