Des trentenaires, des quadragénaires, des plus de 50 ans et des retraités ont défilé avec détermination à Reims.Remi Wafflart.

Près de 30 000 personnes sont descendues dans la rue, hier dans les grandes villes de la Marne, de l’Aisne et des Ardennes, pour crier leur colère contre la réforme des retraites voulue par le gouvernement. Comme ailleurs en France, cela faisait longtemps qu’une telle mobilisation n’avait pas été constatée.

Dans la marne :

10 000 manifestants dont la moitié à Reims

Le mouvement d’hier, même s’il est d’ampleur, reste en deçà de celui de 2010, déjà contre la réforme des retraites voulue alors par Nicolas Sarkozy. Hier, 10 000 personnes sont allées donner de la voix, sans incident, dans les rues des principales villes de la Marne pour s’opposer au nouveau recul de l’âge légal du départ à la retraite. En septembre 2010, pour la première manifestation de la contestation, plus de 20 000 personnes avaient alors été comptabilisées dans le département.

Néanmoins, la mobilisation en cette froide journée de janvier s’est avérée conséquente, ayant rassemblé des personnes d’âges très variés, comme à Reims. Parmi les manifestants – 4 200 selon la police et plus de 5 000 selon les syndicats – des étudiants, des trentenaires, des quadragénaires, des plus de 50 ans et même des retraités ont, dans le calme mais avec détermination, exprimé leur opposition farouche à la réforme des retraites. Parmi les doyens, se trouvait un homme de 75 ans, qui ne travaille plus depuis treize ans. « Si j’ai tenu à être présent aujourd’hui, c’est pour montrer ma solidarité avec les plus jeunes. Car ce n’est pas possible de leur demander de travailler aussi longtemps ! », a-t-il expliqué. À quelques mètres de lui, Aurélia, une jeune prof de français, défilait sous la bannière du syndicat FO. « La retraite, c’est non, parce qu’être devant les élèves à 64, 65, 66 ou 67 ans, ce n’est pas imaginable ! », a-t-elle martelé. « On est en colère et on va le montrer car le gouvernement dépasse les bornes. La retraite, c’est 60 ans… », a de son côté insisté Thomas Rose, le secrétaire adjoint de l’Union locale CGT, tandis que des manifestants scandaient « On est là même si Macron ne le veut pas, pour l’honneur des travailleurs et un monde meilleur ».

À Châlons-en-Champagne, près de 1 900 personnes (un chiffre des forces de l’ordre repris par les syndicats) ont manifesté, une mobilisation d’une ampleur rare pour la ville préfecture. Il faut dire que l’on a croisé des personnes peu habituées des défilés. « J’ai manifesté lors de la dernière grosse mobilisation contre les retraites mais c’est tout », a expliqué Christelle, formatrice quinquagénaire. Vincent, technicien de 57 ans, a dévoilé que « c’est la première fois de ma vie que je manifeste contre le gouvernement ». Et il est prêt à se mobiliser à nouveau, « tant qu’il n’y aura pas de retrait de la réforme ».

Avec 2 000 manifestants (pour les forces de l’ordre et les syndicats), la mobilisation à Épernay n’avait pas été aussi forte depuis longtemps. 

Le constat vaut aussi pour Vitry-le-François (400 à 500 personnes), Sézanne (400 manifestants) alors qu’ils étaient une centaine à Montmirail.

Dans L’aisne :

Métro-boulot-caveau.

Voilà un slogan qui a été abondamment repris dans les manifestations contre la réforme des retraites, ce jeudi dans l’Aisne. Du nord au sud du département, les habitants se sont mobilisés comme on ne l’avait pas vu depuis longtemps. Premier signe qui laissait penser que les Axonais seraient nombreux à s’exprimer dans la rue : le nombre de manifestations organisées. Cinq, en tout.

À Hirson, 600 personnes ont ainsi répondu à l’appel des syndicats. abrina Schalle, représentante du personnel à la CGT, travaille en Ehpad. Elle fait le constat que dans son secteur, « la réforme aurait pour conséquence que les soignants deviennent aussi vieux que les patients » . Jean-Noël Cattier, agent technique territorial à la ville d’Hirson, parle aussi d’usure : « C’est déjà rare qu’on arrive à 60 ans en bon état. » Dans les rues, les retraités sont venus soutenir les actifs. Quelques enfants mais aussi quelques jeunes ont également participé au défilé.

à Laon 1 700,  « Cette réforme est la continuité de la maltraitance des travailleurs», tonnait un représentant du personnel de l’hôpital. « Comment voulez-vous qu’une personne de 64 ans continue de travailler en 12 heures sans que cela représente un risque pour le patient ? Avec cette réforme, il sera impossible de soigner correctement ! »

à Saint-Quentin entre 7 000 et 8 000 participants sont également venus contester la réforme.

à Soissons 2 200 participants. Des salariés de Wicona, de la sucrerie Tereos ou encore d’Intersnack (chips Vico) ont participé. « Je n’avais pas vu autant de monde dans la rue Saint-Martin depuis Wolber » , comparait un manifestant, faisant appel à sa mémoire des douloureuses années de la désindustrialisation, quand Michelin a fermé il y a plus de 20 ans.« On lâche rien », martelait Sarah Van Treeck, secrétaire de l’union locale CGT. 

Dans les Ardennes :

Une marée humaine a déferlé jeudi sur la rocade de Charleville-Mézières. Un cortège au son des sifflets, des pétards et des slogans anti-Macron. À vélo, à pied, en voiture, en famille ou entre collègues, des milliers de personnes se sont agglutinées devant le parc des expositions en attendant le départ, peu après 14 heures. La réforme des retraites a fédéré largement. Selon, un responsable de la CFDT, environ 5 000 personnes ont battu le pavé, la FSU estime à 7 000 le nombre de manifestants. La police évalue le nombre de participants entre 5 000 et 6 000.
 

Parmi les manifestants, Patrick Gay est entouré de son épouse et sa petite-fille, une sortie familiale pas comme les autres : « Nous sommes à la retraite mais nous sommes plus que concernés. Pour nos enfants, nos petits-enfants. Notre place est bien ici. » Un peu plus loin, Jeanne Alfred, une retraitée de Fossé, et Francis Potron, retraité de Bar-lès-Buzancy, débattent. « On n’a pas envie de laisser une société avec un projet qui crée des injustices. Même si je suis déjà retraité, je me sens concerné, parce que je m’intéresse aux projets de société. Et puis ça va au-delà des retraites, c’est un ras-le-bol du gouvernement. Cette réforme des retraites crée des injustices. Je pense à tous ceux qui ont commencé à travailler tôt, qui ont un métier pénible. Moi, j’ai calculé qu’avec cette réforme, comme j’ai fait des études longues, je pourrais partir à la retraite à 66 ans. Je ne me vois pas physiquement continuer à travailler jusqu’à cet âge », témoigne une enseignante du Vouzinois.

L’ampleur du mouvement social était saisissante au moment du départ. Les premiers posaient les pieds sur la rocade que les derniers décollaient à peine du parc des expositions. Gregory Bertrand, l’ex-salarié de Tréfimétaux, trouve là un combat légitime au nom de toutes les générations : « On attaque le peuple, toujours les mêmes. L’âge légal pour faire une demande en maison de retraite est de 60 ans, et on va nous faire bosser jusqu’à 64 ans. On n’en veut pas de leur réforme . » Quentin Haschek est à ses côtés, les deux hommes ne se connaissent pas. Le jeune agent territorial est du genre réservé, mais bel et bien planté dans la foule revendicatrice. « Je suis en repos aujourd’hui mais je tiens à être là , avance-t-il. Je soutiens le mouvement au-delà de mon cas personnel. »

Dans cette foule multicolore, deux agents du musée Guerre et Paix sont présentes. Ce ne sont pas des habituées des manifestations, mais pour ce mouvement, elles n’ont pas hésité longtemps à venir manifester. « On est là pour défendre nos retraites mais surtout celle de nos enfants , expliquent Marion Gilbert, 35 ans, et Florine Constant 37 ans. On se demande jusqu’à quel âge nos enfants vont devoir travailler. »

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