Un chantier XXL à contre courant pour Pol Roger

La maison familiale a fait le choix de développer son activité industrielle en plein centre d’Épernay. Une exception à la règle, à l’heure où l’avenue de Champagne se transforme en vitrine de l’œnotourisme.

Ce chantier pharaonique, le plus conséquent d’Épernay, est actuellement l’un des plus importants concernant le secteur viticole. « Un projet à contre-courant, alors que les maisons de champagne ont plutôt tendance à sortir des villes pour s’implanter en périphérie » titrait l’union dans ces pages économiques du mardi 21 septembre 2021.

« Ce bâtiment de 18 000 m2 accueillera de nouvelles chaînes de production, réparties sur quatre niveaux, habillage, dégorgement, stockage…

« Cette nouvelle infrastructure permettra d’anticiper la croissance des expéditions, avec un objectif de production fixé à 2 millions de cols », explique Laurent d’Harcourt, président du directoire de la maison. « Elle permettra également au personnel de travailler dans des conditions optimisées. Nous pourrons également montrer aux visiteurs l’ensemble des étapes de production d’une bouteille, de la cave à son étiquetage, dans un environnement modernisé. C’est une chance. »

Christophe Klein, délégué syndical CGT, de Pol Roger confirme l’embellie commerciale et atteste que ce projet va améliorer considérablement la qualité de vie, ainsi que les conditions de travail des salariés en production. De plus, il indique que la direction vient de procéder à 2 embauches et qu’elle envisage de recruter dès le début de la mise en activité de ces nouveaux bâtiments.

Ce projet éco-responsable démontre également la volonté de la famille Pol Roger de prendre en compte les aspects environnementaux dans le cadre de la construction de l’extension de leur site de production. Laurent d’Harcourt reconnaît que construire en dehors du centre d’Épernay aurait sans doute coûté moins cher. Mais disposant d’un terrain à proximité, ils ont préféré ne pas détacher le site de production de la cave, car cela aurait impliqué des trajets plus longs pour les poids lourds, et donc une augmentation des émissions de gaz… Alors ils ont pris le pari de rester au cœur d’Épernay.

Pour l’intersyndicat CGT du champagne, si ce chantier semble aller à contre-courant des stratégies de certaines maisons de champagne, il démontre qu’une autre logique industrielle que celle basée sur la réduction des coûts est tout à fait possible.

Pour autant d’autres grandes maisons, fleurons économiques de la champagne, telle Perrier-Jouët ont optées pour une toute autre stratégie. La direction du groupe Pernod Ricard, dans un but de rentabilité par la réduction des coûts a choisi de transférer la quasi totalité des activités de production d’Epernay chez Mumm à Reims. Le combat mené durant 3 mois par les salariés et leur syndicat CGT les a contraints à modifier leur projet : la production des bouteilles de millésime vendues sous la marque « Belle époque » soit environ 1 million de cols, restera à Epernay.

La nouvelle offre oenotouristique de Perrier-Jouët   baptisée « Belle Epoque Society », créée au 26 Av. de Champagne, mêlant art, gastronomie et nature, permettra-t’elle de montrer aux visiteurs l’ensemble des étapes de production d’une bouteille de « Belle époque » de la cave à son étiquetage ? Il est permis d’en douter…

Pour l’intersyndicat CGT du champagne, en tout cas, c’est très clair : l’avenue de Champagne, plus belle avenue du monde, ne doit pas se cantonner à n’être qu’une vitrine de l’œnotourisme, constituée de coquilles vides et où fleurissent bons nombres de bars à vin. Et, se dit convaincu que c’est avec ce genre de projet que la bonne étoile du « champagne » continuera de briller tout en haut de la pyramide mondiale des vins effervescents.

Alors, à contre-courant le projet d’extension du site de production de Pol Roger ? Pas si sûr…